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La haine

Déclarations

Constatations
  
50 ans
d'antisémitisme


 
© Le Populaire et Paris-Soir, Collection personnelle
Georges Fourneret cité par les journaux
Les grands titres de la presse du 14 février relatant l’attentat
Le Populaire du 16 février 1936
 
Trois des agresseurs de Léon Blum ont été arrêtés hier
 
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               Mis en présence d’un des témoins, M. Georges Fourneret dont nous avons relaté ici la courageuse intervention lors de la lâche agression, Courtois fut reconnu formellement.
          — Je suis d’autant plus à l’aise pour affirmer que c’est bien lui, déclara M. Fourneret, qu’à un certain moment, je l’ai saisi au collet. J’ai eu largement le temps de le dévisager.  ........
 
Qu’attendent-ils pour limoger Paul Guichard
L’homme de l’Action Française
               ......
               Nous précisons une fois de plus qu’aucune mesure n’avait été prise pour assurer la circulation. Le service d’ordre était aux mains des seuls Camelots ; ceux-là même que le singulier directeur de la police républicaine voulait embrigader, naguère,  parmi les auxiliaires.
              M. Guichard avait approuvé le parcours que devait suivre le cortège de Jacques Bainville. Celui-ci devait passer devant la Chambre, devant le ministère des Affaires étrangères et se disloquer Place de l’Alma.
          Ainsi on laissait les camelots passer devant la Chambre des
« pourris », ....
               Sans aucun doute, ces messieurs auraient, au passage, injurié le Parlement et les gouvernements républicains.
                      Rue de l’Université                                                         Ministère de la Guerre
                                  n° 100   n° 98                                                Boulevard Saint-Germain n° 231         
Paris-soir 15 février 1936
 
Ce que déclarent M. Monnet, Mme Monnet,
MM. Maurras et Pujo
 
M. Monnet
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               À midi 35 environ, lorsque nous sommes arrivés au carrefour de la rue de l’Université et du boulevard Saint Germain, la circulation des voitures n’était arrêtée pas aucune consigne ni aucun service d’ordre. Ce sont les files de voitures qui stationnaient sur le boulevard Saint-Germain qui nous ont obligés à stopper. En vain, d’ailleurs, l’agent de police présent faisait-il effort pour dénouer l’enchevêtrement des voitures.
               « Des vérifications, d’ailleurs faciles, établiront que le cortège funèbre de Jacques Bainville n’a défilé que plus d’un quart d’heure après.
               « Nous avions, en effet, depuis de longues minutes atteint la maison de la rue de l’Université où M. Léon Blum devait recevoir les premiers soins ; lorsqu’a débouché la tête du cortège.
               « Les assertions de M. Charles Maurras ajoutent un caractère plus odieux encore, s’il est possible, à l’agression dont nous avons été victimes.
 
Une déclaration de Mme Germaine Monnet
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               « Au moment où nous fûmes arrêtés par un agent, boulevard Saint-Germain, un jeune homme passa et cria : « Voilà Léon Blum !» D’autres accoururent, ils portaient le brassard bleu et blanc.
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Les déclarations de MM. Maurras et Pujo
 
               C’est avec la plus grande sérénité que MM. Maurras et Pujo ...ont bien voulu nous recevoir
               « L’incident, déclare M. Maurras est un simple fait divers de la rue. M. Blum avec sa carte de député, a voulu forcer le barrage formé pour le cortège de Jacques Bainville. Ce geste déplu à la foule parisienne, à laquelle les membres de notre Ligue étaient mêlés.
               M. Pujo, qui n’est d’ailleurs pas un témoin direct de l’incident, puisqu’il faisait parie du cortège, fait des déclarations dans le même sens :
          « Il s’agit d’une affaire de chauffard. »
 

Le dramatique récit de M. Fourneret
 
                M. Georges Fourneret, attaché parlementaire, délégué au Sénat, pour le ministère de la Marine marchande, a assisté à toute la scène. En portant secours à M. Léon Blum, il a été lui-même frappé très violemment et il souffre de contusions multiples.
               Voici mot pour mot le récit qu’il a bien voulu nous faire.
           — J’allais déjeuner et je suivais le boulevard Saint-germain, lorsqu’à la hauteur du ministère de la Guerre, je vis une troupe hurlante qui entourait une auto ? Aux cris de «  À mort Blum ! À bas les sanctions ! » ces énergumènes brisaient les vitres de la voiture. M’étant approché, je distinguai à l’intérieur Léon Blum qui, déjà couvert de sang, tentait de se protéger le visage. Au volant je reconnus M. Monnet, député de l’Aisne, et près de Léon Blum, une dame que je sus plus tard être Mme Monnet.
               « Je voulus m’interposer et raisonner les agresseurs. Mais ceux-ci étaient littéralement fous furieux et en nombre considérable : quatre à cinq cents au bas mot. On me frappa à coup de poing et de pied, heureusement, je suis assez solide et, jouant des coudes, je réussis à atteindre l’auto et à m’accrocher à la portière de droite.
               « Pendant ce temps M. Monnet essayait de remettre la voiture en marche en direction de la rue de l’Université. Il ne put y parvenir car les bandits nous suivaient comme une meute féroce et nous encerclaient complétement ? Enfin un agent survint — qui se montra d’ailleurs très courageux — puis un autre. À nous trois aidés de M. Monnet, nous pûmes faire sortir Léon Blum de l’auto. La vue du sang dont M. Blum était inondé parût encore augmenter la fureur des gens d’Action française et il se passa en plein milieu du boulevard uns scène sauvage d’une atrocité révoltante. Certains camelots frappaient Blum à coup de pied dans le ventre, d’autres cherchaient à le jeter à terre, où sans aucun doute ils l’auraient piétiné. « À mort Blum ! À mort Blum ! » hurlaient-ils, et cela était proféré d’une voix si sauvage qu’en un éclair j’ai entrevu le danger mortel qu’effectivement nous courions. Pendant sept à huit minutes je vous affirme que je n’aurais pas donné cher de ma vie. « S’ils tirent, pensais-je nous y passons tous : Léon Blum, M. et Mme Monnet, les deux agents et moi. »
               Finalement une brèche providentielle s’est ouverte devant nous et nous avons pu courir jusqu’à l’immeuble portant le numéro 100 du boulevard Saint-Germain ( rue de l’Université), juste en face l’entrée principale du ministère de la Guerre, mais là on n’ouvrit pas. Ce furent des ouvriers qui travaillaient à côté, au 98, qui nous appelèrent. La porte se referma sur nous. C’était le salut. Plus tard, les agents arrivèrent et déblayèrent l’entrée de l’immeuble ce qui ne m’empêcha pas d’être encore une fois frappé lorsque je sortis pour faire prévenir M. Bracke à la Chambre (le doyen de la Chambre).
 
— O —
 
Témoignage du citoyen Fischel
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               J’aurai voulu m’interposer mais j’étais littéralement noyé dans une foule de camelots qui criaient « À mort Blum ! À mort Blum ! »....................
               «  Horrifié, je vis un des assassins porter à Léon Blum un grand coup de pied au ventre. »
 
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Les témoignages de Roger Hagnauer et de Clémentine Barthez
 
               Nous avons pu joindre Roger Hagnauer, secrétaire de la Fédération de la Seine de la Fédération de l’Enseignement, et Clémentine Barthez de l’Hérault .....
          — Il était environ midi quarante-cinq, nous sortions du 94, rue de l’Université, siège du syndicat national des instituteurs..... Nous avons aperçu Léon Blum dont le sang coulait en abondance. ...
               « Les types continuaient à taper sur Blum. Qu’on ne raconte pas qu’il s’agit d’une manifestation de public ou de passants. J’affirme que ceux qui poursuivaient Blum étaient des individus ayant un brassard et faisant le service d’ordre pour l’enterrement de Jacques Bainville. .....
     Et Clémentine Barthez d’appuyer :
          — Oui, ils avaient des brassards...
 

— O —
 
Un couple de braves gens
 
               Poursuivant notre enquête, nous nous sommes rendus, dans l’après-midi, 98, rue de l’Université. .... Les concierges nous content à leur tour comment le président du Groupe Socialiste au Parlement a été victime d’une agression.  ..........
               Ce sont des ouvriers du bâtiment - ils étaient six - qui apercevant au loin l’échauffourée sont sortis avec nous, ont fait rentrer Léon Blum et se sont placés avec deux agents devant la porte pour empêcher que le passage fut forcé.
 
Ce que nous dit Germaine Monnet
 
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               Je suis persuadée que nous y serions passés, nous dit notre camarade. ..............
 


— O —
               « Quelques minutes plus tard nous montions en voiture ; moi conduisant et Léon Blum assis derrière à côté de ma femme.
               « Comme nous arrivions à l’angle de la rue de l’Université et du boulevard Saint-Germain, nous avons remarqué sur les trottoirs des hommes portant des brassards fleurdelysés et, stationnant derrière eux une foule assez dense. Nous avons alors pensé qu’il s’agissait des membres de l’Action Française venus pour les obsèques de Jacques Bainville.
 
« Blum à mort ! »
               « Le boulevard Saint-Germain était complétement embouteillé par plusieurs files de voitures. Nous dûmes donc nous arrêter.
              « Léon Blum ayant été reconnu, des cris s’élevèrent aussitôt sur deux trottoirs : » Blum à mort ! assassin, assassin ! ».
               « Quelques secondes plus tard, descendant des trottoirs et s’avançant au milieu des voitures parmi lesquelles nous stationnons, des camelots du roi s’approchèrent, une dizaine, puis vingt, puis cinquante se mirent, tout en continuant à nous invectiver, à porter des coups sur une vitre de la voiture.
               « Je baissais la vitre avant pour exhorter les adversaires à la raison. Le seul résultat fut que je reçus un coup de poing dans la figure.
               « Dans le même temps, les portes arrière étaient ouvertes des deux côtés et violemment rabattues en arrière, les camelots du roi s’efforçaient de porter des coups à Léon Blum.
               « Certains des camelots cherchaient à l’attirer dehors, par la portière de droite, pour pouvoir porter plus librement leurs coups sur Léon Blum.
               « Tout à coup la vitre de la lucarne arrière fut brisée et nous vîmes Blum couvert de sang avec une plaie profonde à la tempe, à la naissance de l’oreille.
               « Voyant que Blum était surtout en danger par derrière, je descendis alors pour me placer devant la malle arrière de la voiture où je tins en respect ceux des agresseurs qui se trouvaient là. Un agent, enfin survenu, et quelques passants s’interposèrent, d’ailleurs, de leur mieux sur le côté gauche de la voiture. De même sur le côté droit un autre agent intervenait secondé par quelques autos de spectateurs intrigués.
 
Des gars du bâtiment accourent
               « Soudain, quelques ouvriers en cotte bleue s’avancèrent. Ils avaient vu, du haut de leurs échafaudages les camelots du roi déchaînés et ils avaient senti que leur devoir les appelait à prendre part à la bataille.  Nous nous trouvâmes ainsi une quinzaine au milieu du flot de nos agresseurs, trop nombreux à ce moment là pour que je puisse risquer une évaluation.
               « Blum et ma femme décidèrent alors de sortir de la voiture, et notre petit groupe se fraya un passage jusqu’au maisons sises au bord de la rue de Lille. Lorsque nous approchâmes de la plus voisine, la porte se ferma, alors que nous en étions encore à quelques mètres. Nous allâmes jusqu’à la seconde maison, celle du 98, et qui était justement celle où travaillaient les camarades du bâtiment qui étaient venus à notre secours, et qui avaient défendu Blum avec le courage que l’on devine, contre une meute de plus en plus déchaînée.
 
Au chantier de la maison 98, rue de l’Université.
               « Ils firent asseoir Blum dans leur chantier et l’entourèrent des soins les plus affectueux, aidés du brave ménage de concierges qui nous apporta tout ce qu’ils avaient à leur disposition pour arrêter une hémorragie qui avait déjà complètement couvert de sang la chemise, le veston et le pardessus de Léon Blum.
               « Un agent étant entré pour s’informer de ce qui se passait, nous l’envoyâmes aussitôt téléphoner au médecin de la Chambre. Celui-ci arriva environ vingt minutes plus tard, et c’est alors que soudain j’éprouvais une immense angoisse.
 
L’angoisse
« Lorsqu’il enleva, en effet, de la tête de notre ami, le pansement sommaire et tout baignant de sang, je vis dans la serviette éponge un si gros caillot de sang, en même temps que j’apercevais le petit jet qui giclait de la tempe, que je me demandais si, par malheur, les blessures n’étaient pas plus graves que nous ne l’avions cru. Le docteur fit un pansement rapide et M. Guichard, arrivé sur ces entrefaites, ayant fait pénétrer sa voiture dans la cour de l’immeuble, nous pûmes partir pour l’Hôtel-Dieu. »
 

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Le Populaire du 14 février 1936
 
Le récit de Georges Monnet
 
               — Notre ami Levindrey, maire de Laon et ses adjoints, Pierre Bloch, Létrillard et Bouré, étaient venus à Paris pour certaines démarches intéressant la ville de Laon. Léon Blum que je comptais raccompagner chez lui, entra avec moi, à la sortie de la Chambre, vers midi trente, leur serrer la min au café « Le Bourbon » qui se trouve derrière la Chambre au coin de la rue de l’Université.
 
Déclarations des témoins à la presse
Rue de l’Université            n° 100                                          et  98
 



















© Pierre Fourneret                Ministère de la Guerre, 231 bd St-Germain
 

                   
Un destin forgé par l'histoire